Misère, misèèèèère !! (épisode 1b).
Le retour de la saga du vendredi !
« Allez mesdames, messieurs, ne soyez pas timides; Venez acheter la vérité non pas pour 50 Euros, même pas pour 30 Euros, pas même pour 25 Euros mais pour moins de 20 Euros ! Oui! Vous ne rêvez pas, c'est bien la réalité, mesdames, messieurs ! Une connexion directe avec Dieu pour moins de 20 Euros !
N'ayez pas peur de vous faire plaisir, n'ayez pas peur de connaître les secrets de l'univers, n'ayez pas peur d'accéder à la vie éternelle pour moins de 20 Euros seulemeeeeeeent ! La résurrection des morts pour le prix d'un DVD. La foi pour le prix d'un sac de pommes de terre. N'hésitez pas une seconde !
...
Mademoiselle ! Mademoiselle ! Un petit livre peut-être?? Pour aider un chômeur. »
La jeune fille regarda Miteny d'un air dédaigneux. Elle jeta un coup d'œil méprisant à l'ouvrage que le pauvre homme tentait de vendre si maladroitement puis accéléra le pas. Il faut dire que l'individu n'avait rien d'attirant. Il sentait la sueur et portait une barbe de deux semaines. Ses habits semblaient supplier qu'on les aide à quitter la peau de ce looser et à enfin accéder à cet endroit magique qu'on appelle « machine à laver ».
Miteny eut à peine le temps d'admirer la finesse de la silhouette de celle qui l'avait méprisé. Maintenant être méprisé, il avait l'habitude. Il était si malheureux, mais ça aussi il avait l'habitude.
Il avait du quitter son logement après avoir été viré de son travail suite à la terrible crise qu'était en train de traverser la France. L'euro s'était écroulé, l'Allemagne était sortie de la communauté européenne et en Italie, c'était la guerre civile. Bref, c'était vraiment le bordel.
La situation était ironique quelque part, car tout ce qu'il se passait, il l'avait prévu et écrit dans le livre qu'il vendait maintenant à la sauvette. Il avait acheté tout un stock avec ses dernières économies et, pour donner un sens à sa vie, il abordait les passants en essayant de les détourner de leur quotidien morose avec ce qui était pour lui LA VÉRITÉ.
Mais soyons précis. En fait il n'abordait pas les passants mais les passantes. Il visait en priorité les jolies filles. Un sourire lui donnait le morale pour la journée. Un sourire ponctué d'un « non, merci », ça lui faisait deux jours. Et si la créature de rêve lui prêtait ne serait-ce que quelques secondes d'attention, il était presque heureux pendant un mois. Il faut savoir se contenter de peu quand on est dans la misère.
Tout à coup, il fut pris d'une immense tristesse. Ça lui arrivait souvent. Il avait le sentiment d'avoir raté sa vie. Oui, il le savait, il avait tout raté. Il n'avait même jamais réussi à avoir une copine digne de ce nom. Seule une idée lui permettait de tenir le coup; il voulait voir 2035. Il voulait savoir ce qui allait se passer maintenant que le monde s'écroulait à vitesse grand V. Mais cette idée ne lui permettait pas d'être fort tout le temps; alors il s'assit parterre, baissa la tête et plaça devant ses pieds la pancarte qu'il avait préparé et qui disait « Pour manger, je vends ce livre ».
Pas très convaincant.. mais, que voulez-vous, il n'avait jamais été très doué pour la publicité. Des larmes coulèrent le long de ses joues... Absorbé par la contemplation de son propre malheur, il ne vit pas que des skinheads étaient en train de l'encercler. L'un d'eux lui donna un coup de pied. Miteny sursauta et releva la tête, tout surpris. Aussitôt, il comprit qu'il allait passer un sale quart d'heure...
A SUIVRE